II. Epistémologie des modèles mathématiques

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1. Le problème du platonisme en mathématiques 

La question du platonisme reste l'une des plus centrales de la philosophie des mathématiques. Nous avons analysé certaines des diverses positions philosophiques en présence: le platonisme pragmatique de W.V.O. Quine, le réalisme antinominaliste de J. Burgess, le platonisme cognitif de P. Maddy, le platonisme structuraliste de M. Resnik, l'antiplatonisme de Ph. Kitcher, celui constructiviste (dérivé d'H. Weyl) de S. Feferman, celui nominaliste (éliminativiste) d'H. Field. Nous avons également étudié le débat Connes-Changeux. Nous avons enfin analysé en détail les thèses antiplatoniciennes de Wittgenstein.

L'analyse de ces positions en conflit montre que la plupart des difficultés proviennent de l'application non critique aux idéalités mathématiques d'une conception ontologique du concept de réalité. Or ce n'est pas la réalité ontologique des idéalités mathématiques qui fait question mais leur objectivité. Pour clarifier la question du platonisme, il faut donc disposer au préalable d'une doctrine correcte de l'objectivité. Notre hypothèse est qu'il faut utiliser la doctrine transcendantale.

Contrairement aux conceptions dominantes, il faut souligner que l'objectivité des mathématiques n'est pas seulement de nature symbolique. Elle se fonde aussi dans l'intuition pure du continu. Or le problème de la nature du continu reste encore largement ouvert. Nous avons développé à ce sujet une double réflexion : d'une part sur la signification épistémologique de l'Analyse non standard, d'autre part sur la possibilité de justifier un platonisme à la Gödel.

La théorie de la détermination projective (travaux de Friedman, Jackson, Kunen, Martin, Moschovakis, Solovay, Woodin, Dehornoy, etc.) a permis de démontrer quel est le "prix à payer" (en termes "d'ontologie" ensembliste) pour pouvoir disposer d'une "bonne" théorie du continu. Elle part du fait que la théorie des ensembles classique (ZFC) laisse l'arithmétique des cardinaux très largement sous-déterminée et elle explique comment on peut la compléter par des axiomes non constructifs d'existence de grands cardinaux. Ces résultats plaident fortement en faveur du platonisme de Gödel. Les travaux de Hugh Woodin sont cruciaux à cet égard. Nous les avons analysés en détail.

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2. Analyse de différentes doctrines de philosophie des mathématiques

Nous avons travaillé aussi sur l'analyse des philosophies des mathématiques: H. Poincaré, J. Cavaillès, F. Gonseth et, surtout, A. Lautman. Nous avons appliqué ces éléments de philosophie mathématique à l'analyse épistémologique de certains résultats mathématiques particulièrement significatifs, en particulier à la preuve proposée par A. Wiles de la conjecture de Taniyama-Weil sur la base des travaux antérieurs de G. Frey, J.P. Serre, B. Mazur et K. Ribet.

Nous avons aussi analysé la philosophie mathématique de C.S. Peirce, en particulier son réalisme métaphysique et les rapports qu'il entretient avec les conceptions de Riemann et de Cantor.

Nous avons également travaillé sur la philosophie de la géométrie, de Gauss et des géométries non euclidiennes jusqu'à Poincaré et Cartan. Nous avons élaboré une interprétation transcendantale de son implication dans les théories physiques.

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3. Epistémologie de la physique mathématique (actualité de la philosophie transcendantale)

En ce qui concerne la physique mathématique, nous avons montré à travers une analyse détaillée de la mécanique hamiltonienne (et de la géométrie symplectique associée), de la relativité générale et de la théorie quantique des champs (théories de jauge non abéliennes et théorie des supercordes) que le rôle constitutif des symétries dans les théories physiques imposait une conception néo-transcendantale du réalisme physique.

Nous avons en particulier étudié, d'abord la façon dont le formalisme de l'application moment permet de dégager la signification profonde du théorème de Noether, ensuite la façon dont l'approche variationnelle de la relativité générale (proposée par Hilbert et poursuivie entre autres par la géométro-dynamique d'A. Wheeler) permet d'en expliciter le contenu "synthétique a priori", enfin la façon dont les invariances de jauge fonctionnent comme des principes dynamiques permettant d'engendrer a priori des interactions. Ces exemples montrent que ce sont bien les constructions mathématiques qui détiennent la signification philosophique des théories physiques.

Ces approches néo-transcendantales ont convergé avec les  réflexions de plusieurs autres spécialistes comme Michel Bitbol, Pierre Kerszberg ou Michael Friedman.  Des discussions approfondies ont eu lieu dans des groupes de travail organisés par Bernard d'Espagnat à l'Académie.

Ces dernières années, c'est surtout à la géométrie non-commutative d'Alain Connes dans ses liens avec la gravité quantique que nous avons consacré nos réflexions sur la philosophie de la physique.

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4. Philosophie et phénoménologie de la forme

Une philosophie des mathématiques et de l'objectivité physico-mathématique laisse largement ouverte la problématique phénoménologique du monde du sens commun tel qu'il se manifeste à nous à travers l'appréhension perceptive et la description linguistique. Or ce monde commun est essentiellement celui qu'étudient les sciences cognitives. D'où l'intérêt d'une compréhension philosophique du lien entre ces deux dimensions de la réalité.

Comme René Thom l'a montré, le concept de forme joue un rôle médiateur essentiel entre l'objectivité physique et la manifestation phénoménologique. D'où la pertinence de reprendre philosophiquement les théories de la forme. Nous avons poursuivi de nombreuses recherches dans ce domaine et analysé la façon dont certains philosophes, en particulier Kant, Goethe et Husserl, ont traité de la question de la forme.

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